Skip to Content

Saint-Pierre, Grand Orgue

Le grand orgue de la Collégiale Saint-Pierre est constitué d’un monumental buffet classique en chêne de 1740 et d’un corps sonore construit entre 1914 et 1922, installés en tribune à l’entrée de la nef.

La collégiale elle-même fut érigée en 1750. Destinée à recevoir le parlement de Flandre et un vaste collège de chanoines, elle frappe par ses dimensions de cathédrale. C’est la plus grande église du diocèse de Cambrai. Son architecture ne manque pas d’élégance, de clarté, et la richesse de son mobilier et de ses tableaux du XVIIIe siècle en font un témoin privilégié de l’époque classique.

L’orgue de l’abbaye d’Anchin

Réalisé en 1740 pour l’abbaye bénédictine Saint-Sauveur d’Anchin (Pecquencourt), le buffet renfermait à l’origine un instrument commandé en 1738 au facteur d’orgues arrageois Cornil Cacheux (1687–1738) et achevé par Charles Dallery (1702–1779) d’Amiens. Le buffet en chêne a été sculpté par Antoine Gilis (1702–1781) de Valenciennes à partir des plans et dessins des moines bénédictins. Richement orné de trophées de musique sculptés en relief sur le soubassement, d’ornements de frises, de claires-voies et de tombées végétales, le buffet possède une importante statuaire d’anges musiciens, ainsi qu’un David et une Sainte-Cécile sur les tourelles latérales. La tourelle centrale supportait à l’origine un Saint-Sauveur assis qui fut remplacé à la fin du XVIIIe siècle par une horloge, puis en 1878 par l’actuel Saint-Sauveur debout.

Après la Révolution, l’abbaye Saint-Sauveur fut vendue et démembrée. En 1792, le conseil de fabrique de la collégiale réussit à obtenir le grand orgue pour la collégiale qui n’en possédait pas encore. L’instrument fut transféré à Douai et agrandi entre 1792 et 1794 par Louis Péronard (1726–1801) de Reims. Entre temps, la collégiale fut transformée en Temple de la raison à la fin de l’année 1793. C’est certainement à cette occasion que le Saint-Sauveur assis fut remplacé par une horloge.

Composition probable de l’orgue Cacheux-Dallery-Péronard vers 1796 :

I. Positif (60 notes, Fa0–Fa5)
Montre 8′ – Bourdon 8′ – Prestant 4′ – Flûte 4′ – Nazard 2′ 2/3 – Doublette 2′ – Tierce 1′ 3/5 – Cornet V – Fourniture – Cymbale – Trompette 8′ – Cromorne 8′ – Voix humaine 8′ – Clairon 4′

II. Grand-Orgue (60 notes, Fa0–Fa5)
Montre 16′ – Bourdon 16′ – Montre 8′ – Bourdon 8′ – Flûte 8′ (dessus ?) – Gros Nazard 5′ 1/3 – Prestant 4′ – Flûte 4′ – Grosse Tierce 3′ 1/5 – Nazard 2′ 2/3 – Doublette 2′ – Quarte 2′ – Tierce 1′ 3/5 – Cornet V – 1re Fourniture – 2e Fourniture – Cymbale – Bombarde 16′ – Trompette 8′ – Clairon 4′ – Voix humaine 8′

III. Récit (37 notes, Fa2–Fa5 ?)
Bourdon 8′ – Cornet IV – Trompette 8′ – Hautbois 8′

IV. Écho (37 notes, Fa2–Fa5 ?)
Cornet V

Pédale (30 notes, étendue inconnue)
Bourdon 16′ – Flûte 8′ – Flûte 4′ – Gros [sic] Nazard 2′ 2/3 – Bombarde 16′ – 1re Trompette 8′ – 2e Trompette 8′ – Clairon 4′

Accouplement I/II à tiroir
Grosse caisse
Timbale
Tremblant(s ?)

Plusieurs fois relevé par François-Joseph Carlier de Douai entre 1807 et 1853, puis par Joseph Merklin en 1857–58, l’orgue d’Anchin réussit à conserver une part de son état d’origine — malgré quelques transformations notamment la suppression de l’Écho, le développement du Récit devenu probablement expressif, ou le brunissement du buffet — jusqu’en 1917, année où l’armée allemande réquisitionna les tuyaux de façade. En octobre 1918 l’orgue est vandalisé, les tuyaux jetés en bas de la tribune, peu de temps avant l’évacuation de la ville.

Composition probable de l’orgue Cacheux-Dallery-Péronard-Carlier-Merklin vers 1914 :

I. Positif (60 notes, Fa0–Fa5)
Montre 8′ – Bourdon 8′ – Flûte 8′ – Prestant 4′ – Flûte 4′ – Nazard 2′ 2/3 – Doublette 2′ – Tierce 1′ 3/5 – Cornet V – Fourniture – Cymbale – Trompette 8′ – Cromorne 8′ – Clairon 4′

II. Grand-Orgue (60 notes, Fa0–Fa5)
Montre 16′ – Bourdon 16′ – Montre 8′ – Bourdon 8′ – Flûte 8′ – Gros Nazard 5′ 1/3 – Prestant 4′ – Flûte 4′ – Grosse Tierce 3′ 1/5 – Nazard 2′ 2/3 – Doublette 2′ – Quarte 2′ – Tierce 1′ 3/5 – Cornet V – 1re Fourniture – 2e Fourniture – Cymbale – Bombarde 16′ – 1re Trompette 8′ – 2e Trompette – Clairon 4′

III. Récit (étendue inconnue)
Bourdon 8′ – Kéraulophone 8′ – Flûte 8′ – Voix céleste 8′ – Cor anglais 8′ – Trompette 8′ – Hautbois 8′ – Voix humaine 8′

Pédale (30 notes, étendue inconnue)
Flûte 16′ – Flûte 8′ – Flûte 4′ – Gros [sic] Nazard 2′ 2/3 – Bombarde 16′ – 1re Trompette 8′ – 2e Trompette 8′ – Clairon 4′

L’orgue symphonique de Charles Mutin

Après la guerre, et sur l’initiative de Maurice Wagon, président de chambre à la Cour d’appel, du Chanoine J.-B. Hégo, doyen de Saint-Pierre et de Francis Godin, maire de Douai, la ville achète un nouvel instrument à la firme Mutin-Cavaillé-Coll. Cet orgue que Charles Mutin (1861–1931) avait conçu et construit en 1914 à la demande d’Alexandre Glazounov pour la grande salle du conservatoire de Saint-Pétersbourg ne fut jamais livré en raison de la guerre — le régime bolchevique en exigea même le remboursement. Charles Mutin installe alors l’instrument à Douai en l’adaptant au buffet classique qui avait été classé au titre des Monuments historiques en 1906.

Le nouvel orgue de style symphonique fut inauguré le 12 novembre 1922 par Louis Vierne (1870–1937), titulaire de Notre-Dame de Paris qui, 20 ans plus tôt, avait déjà donné un récital à l’église Saint-Jacques pour l’inauguration de son buffet d’orgue. Alexandre Delval, titulaire de l’instrument de 1904 à 1951, le fait entendre très régulièrement pendant les offices et en concert, notamment lors des premiers récitals radiodiffusés, jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale, durant laquelle l’orgue subit indirectement les conséquences des bombardements qui détruisirent près de la moitié de la ville.

La municipalité prit en charge la restauration du grand orgue, confiée à la Maison Pascal de Lille, de 1954 à 1957. Respectueuse du caractère symphonique original de l’instrument, Jean Pascal unifia l’ensemble de la transmission en construisant une mécanique neuve avec machine Barker au clavier d’Écho, originellement électrique. L’instrument restauré fut inauguré par Marcel Dupré, titulaire du grand orgue de l’église Saint-Sulpice à Paris avec le concours de la Manécanterie des petits chanteurs de Saint-Jean sous la direction de l’Abbé Félix.

Très empoussiéré à la suite des grands travaux entrepris dans l’église en 1964-65, du remplacement des vitraux près de l’orgue en 1971, de l’incendie d’un magasin de sport situé près du chevet en 1975, et par le vandalisme de trois jeunes voyous en 1977, la municipalité a pris en charge un grand relevage de l’instrument en 1983 par tranches annuelles, grâce aux précieux conseils de l’Association Aristide Cavaillé-Coll de Paris, travaux confiés de nouveau à Jean Pascal. L’instrument fut classé en mars 2002 et, à la demande du maire Jacques Vernier, un inventaire technique complet de l’instrument fut réalisé en 2005 par Roland Galtier, technicien-conseil auprès de Monuments historiques.

Cet orgue monumental possède une console indépendante impressionnante (celle-là même qui aurait dû être installée à Saint-Pétersbourg) de 4 claviers manuels — dont 3 expressifs — de 61 notes, d’un pédalier de 32 notes et de 69 jeux. Sa conception complexe, la grande qualité de sa facture, son amplitude sonore et sa richesse de timbres, font de lui l’un des trois instruments majeurs de la période symphonique française dont celui de Saint-Sulpice (Paris, 1862) incarne la fondation, celui de Saint-Ouen (Rouen, 1890) l’apogée, et enfin celui de Saint-Pierre (Douai, 1922) le dernier chef-d’œuvre.

Depuis, cet orgue n’a cessé de rayonner sur le plan culturel. Des musiciens, facteurs d’orgues et musicologues de nombreux pays viennent chaque année le visiter, et l’association Orgues à Douai programme une saison annuelle de concerts, un concours et facilite l’accueil des artistes qui viennent l’enregistrer.

Composition actuelle :

I. Grand-Orgue (61 notes)
Montre 16′ – Bourdon 16′ – Montre 8′ – Bourdon 8′ – Flûte harmonique 8′ – Violoncelle 8′ – Prestant 4′ – Flûte octaviante 4′ – Quinte 2′ 2/3Doublette 2′Tierce 1′ 3/5Plein-jeu IVBombarde 16′Trompette 8′Clairon 4′

II. Récit expressif (61 notes)
Bourdon 16′ – Diapason 8′ – Flûte traversière 8′ – Quintaton 8′ – Viole de gambe 8′ – Voix céleste 8′ (ut2) – Principal 4′ – Flûte octaviante 4′ – Octavin 2′Plein-jeu VBasson 16′Trompette harmonique 8′Soprano harmonique 4′Basson-Hautbois 8′

III. Positif expressif (61 notes)
Quintaton 16′ – Principal 8′ – Flûte conique 8′ – Cor de nuit 8′ – Salicional 8′ – Flûte douce 4′ – Viole d’amour 4′ – Nasard 2′ 2/3Flageolet 2′Tierce 1′ 3/5Trompette 8′Clarinette 8′Voix humaine 8′

IV. Écho expressif (61 notes)
Bourdon 16′ – Montre 8′ – Bourdon 8′ – Flûte 8′ – Salicional 8′ – Éoline 8′ (ut2) – Quinte 5′ 1/3 – Viola 4′ – Tierce 3′ 1/5 – Octave 2′ – Plein-jeu II-III – Bombarde 16′ (ut3) – Trompette harmonique 8′

Pédale (32 notes)
Principal 16′ (GO) – Flûte 16′ – Violonbasse 16′ – Soubasse 16′ (GO) – Quinte 10′ 2/3 – Principale grande 8′ – Violoncelle 8′ – Flûte 8′ – Bourdon 8′ (GO) – Principal 4′ – Flûte 4′ – Tuba 16′Trompette 8′Clairon 4′
Tirasses I, II, III, IV

Accouplements (cuillers) I/I, II/I, III/I, IV/I, III/II
Accouplements (tirants) IV/II, IV/III, II/I 16′, III/II 4′
Trémolos II, III
Appels Anches Ped, I, II, III (jeux en italique)
Appel Flûte 16′ Pédale
Transmission mécanique avec 4 machines Barker (système à dépression)
Sommiers à registres, appel des jeux pneumatiques
4 combinaisons ajustables mécaniques à effet visible (système Veerkamp–Mutin)